Pocos poetas europeos contemporáneos han atravesado sus fronteras. Los cantautores, que son poetas también, hacen más fácil ese viaje. Si me preguntan qué poesía refleja mejor la construcción europea, diría sin duda las canciones por la paz, la democracia y los derechos humanos en las décadas de 1960, 70 y 80.

En España tuvimos a grandes como Serrat, Aute, Ibáñez y muchos otros. En Europa hubo artistas memorables como Jacques Brel, Georges Brassens o Georges Moustaki. En homenaje a aquella época que reclamó valores profundamente europeos para el mundo, señalemos una obra de Barbara (MoniqueSerf, 1930-1997). De origen judío ucraniano, su familia se escondió en varios lugares de Francia durante la Segunda Guerra Mundial para evitar el Holocausto. En 1964 (el Tratado del Elíseo se había firmado un año antes), Barbara escribió este maravilloso poema en una visita a Göttingen. Los aliados habían bombardeado aquella ciudad alemana, del mismo modo que los alemanes habían llevado la destrucción a Europa. Barbara cantó con ternura que el deseo de vivir y el amor son dignos de respeto en todas partes. “Que no vuelva nunca el tiempo de la sangre y el odio, pues amo a la gente de Göttingen”. Presentar aquí una poesía en francés es otra forma de homenajear una Europa de esencia multicultural.

 

Bien sûr, ce n’est pas la Seine,

ce n’est pas le bois de Vincennes,

mais c’est bien joli tout de même,

à Göttingen, à Göttingen.

Pas de quais et pas de rengaines

qui se lamentent et qui se traînent,

mais l’amour y fleurit quand même,

à Göttingen, à Göttingen.

Ils savent mieux que nous, je pense,

l’histoire de nos rois de France,

Herman, Peter, Helga et Hans,

à Göttingen.

Et que personne ne s’offense,

mais les contes de notre enfance,

"Il était une fois" commencent

à Göttingen.

Bien sûr nous, nous avons la Seine

et puis notre bois de Vincennes,

mais Dieu que les roses sont belles

à Göttingen, à Göttingen.

Nous, nous avons nos matins blêmes

et l’âme grise de Verlaine,

eux c’est la mélancolie même,

à Göttingen, à Göttingen.

Quand ils ne savent rien nous dire,

ils restent là à nous sourire,

mais nous les comprenons quand même,

les enfants blonds de Göttingen.

Et tant pis pour ceux qui s’étonnent

et que les autres me pardonnent,

mais les enfants ce sont les mêmes,

à Paris ou à Göttingen.

O faites que jamais ne revienne

le temps du sang et de la haine

car il y a des gens que j’aime,

à Göttingen, à Göttingen.

Et lorsque sonnerait l’alarme,

s’il fallait reprendre les armes,

mon cœur verserait une larme

pour Göttingen, pour Göttingen.